[Brésil] Un Chasseur sachant chasser [Pv Cheetah]

La main de Diaq'Rah n'avait au final été qu'un subterfuge, quelque chose qui mettait suffisamment l'eau à la bouche à Cheetah pour qu'elle ait un entretien avec Hurt. Et ce dernier avait un pacte, du moins une espèce d'alliance à lui proposer. Les griffes toujours dehors, l'humanoïde s'approcha un peu plus de Hurt. Peut être se sentait-il en sécurité avec les hommes qui étaient dehors et qui étaient sans doute en alerte en ayant vu les rideaux de fer bloquer à toutes les fenêtres, elle ne se sentait pas pour autant intimidée. Elle avait déjà affronté des situations périlleuses et s'en était sortie sans une égratignure. Elle décocha alors un léger sourire à son tour, puis fit tomber la coupe de champagne qui lui était destinée à terre. Elle pouvait agir comme une vraie garce, mais ça, ça ne venait pas de sa nouvelle nature, elle était déjà comme ça avant, pour peu qu'on veuille se sentir supérieur à elle.

« Donc vous insinuez que je serai plus utile à l'élimination des justiciers qui nous entravent la route via une organisation… Donc vous insinuez que je serai plus utile attachée en laisse que libre ? »

Elle attrapa alors Hurt par le col, ses yeux beaucoup plus fins, signe qu'elle n'allait rien lui faire d'autre. Et puis, elle l'aurait déjà étripé et dépecé depuis pas mal de temps.

« Je n'ai ni Dieu, ni maîtres, et ce n'est pas de la pisse en bouteille qui peut m'amadouer. »

Elle laissa en même temps échapper un léger sifflement qui se rapprochait beaucoup plus du miaulement.

« Quant à la main de Diaq'Rah, je veux la preuve que vous l'avez en votre possession, et n'osez pas vous mettre en travers de mon chemin. La chasse aux justiciers n'est satisfaisante que si on la fait en solitaire, et non avec une bande de bourgeois comme on peut le voir dans les safaris en Afrique, encore que ces derniers n'osent plus mettre les pieds dans certaines zones du continent. »

Elle souriait de nouveau en même temps, depuis son apparition, Cheetah s'était déjà occupée de nombreux chasseurs venus d'Occident, terrorisant certains touristes venus uniquement pour tuer girafes ou lions.

Son invitée se montrait clairement hostile. C'en était navrant. Simon avait espéré que sous cette peau animale se cachait un esprit capable d'embrasser toute la complexité du monde et de comprendre l'intérêt qu'il y avait à s'allier, même temporairement. Elle se contenta donc de faire tomber une coupe de champagne, gaminerie inconséquente, et de parler de liberté. Pauvre sotte songea le docteur, combien d'hommes et de femmes sont tombés pour avoir parlé ou défendu leur liberté? Combien avaient pris cette notion pour la tordre au point même d'en faire une entrave? La liberté était toujours limitée, elle durait la longueur de la chaîne que l'on s'appliquait souvent à soi-même.

Avant qu'il n'ait eu le temps de répliquer à sa remarque, elle le saisit au cou, un geste d'une affreuse proximité qui n'était pas au goût de Hurt. Il lui lança un regard noir en réponse à cette violation de son cercle d'intimité. Elle était plus forte oui, plus agile, plus rapide, mieux armée, elle aurait pu lui donner une bonne estafilade et la conversation aurait pu s'achever là, mais quelque part dans son esprit se cachait un désir. Un désir qu'il serait facile d'utiliser et de tordre, quitte à la briser totalement. L'esprit, telle était son ultime faiblesse. Restait à trouver lequel.

Elle lui servit alors un couplet sur les plaisirs solitaires de la chasse. Que croyait-elle affronter? Un lion? Un tigre? Non, c'était des hordes de justiciers qui viendraient bientôt. Le retour de Batman était un signe avant-coureur. Les médias transmettaient des nouvelles sur les actions de Power Girl chaque jour, on avait revu Wonder Woman et même Nightwing agissait. Et maintenant que des terroristes comme Bane faisaient leur publicité télévisée, nul doute qu'ils allaient bientôt s'allier comme dans les temps passés. Avait-elle seulement, dans la veille solipsiste de sa solitude eut conscience du jeu des alliances et des unions qui allaient se profiler?

Le docteur eut un mouvement de tête pour enlever un peu de la tension qui lui étreignait la gorge.

- Je vous accorde que ce champagne est très mauvais, commença-t-il avec acidité, je me fierais cependant à votre expérience pour jauger de la comparaison. Vous n'avez ni Dieu ni Maître dites-vous? Belle bêtise lorsque l'on voit votre enchaînement à la Nature elle-même. Vous êtes impulsive, motivée par de bas instincts quitte à vous aveugler. Et pour vous répondre honnêtement, seule, vous finirez démunie face à la dure réalité. Nos ennemis et j'entends pas là les justiciers, n'ont jamais agi de façon solitaire dans le passé et la seule fois où ils se sont séparés, Trigon a attaqué et remporté une impressionnante victoire. Combien de temps croyez-vous qu'ils resteront en ordre dispersé? Combien de temps croyez-vous qu'il vous reste à chasser solitairement?

" J'ai connu des personnes qui désiraient elles aussi un monde sans règle, un monde où ils pourraient vivre à l'écart de la société. Ils se sont éloignés de ceux qui leur tendait la main et les révolutions les ont emportés. Ils avaient des idéaux, de la force, mais à combattre à un contre cent ont fini par être débordé. Pelage ou non...

Il déglutit, la position était inconfortable et malgré la proximité, il ne se sentait pas très proche de cette créature. Elle désirait des garanties sur l'artefact, un comportement qu'il s'attendait à découvrir chez elle, qui aurait pu croire la parole d'un homme qui venait de vous piéger?

- Si vous voulez une preuve, j'ai une photographie de l'artefact dans la poche intérieure de ma veste, annonça-t-il.

Lorsqu'elle parla des bourgeois chasseurs en Afrique, il ne put s'empêcher de penser qu'elle cherchait à l'énerver, il eut un sourire narquois.

- A chasser seul, on attrape qu'une proie, que ferez-vous lorsqu'elles seront plus nombreuses? demanda-t-il. Et surtout lorsqu'elles seront agressives? Vous mordrez la main qui vous est tendue et vous étoufferez avec. Vous aviez une chance de quitter votre condition de victime en puissance mais vous n'avez pas réfléchi une seule seconde au fait qu'une laisse est parfois moins mortelle que la liberté. Sans doute est-ce là une pensée trop bourgeoise à votre goût?

Il soupira en regardant cette femme. C'était-il à ce point mépris sur ses capacités à se projeter dans l'avenir?

- Enfin... si vous voulez savoir où se trouve exactement l'artefact, je crains qu'il ne vous faille me relâcher.

A cet instant, deux hommes armés suivis de Manuel Hestoco débarquèrent dans la pièce en ouvrant la double-porte à grand renfort de coup de pied. Manuel, un talkie-walkie à la main donna des ordres clairs.

- Butez-moi le maître et Cheetah! Je veux voir leurs dépouilles!

Les deux hommes mirent en joue leurs deux cibles et ouvrirent le feu. Les masques tombaient enfin.

Cheetah n'eut même pas le temps de répliquer qu'elle dû plaquer à terre directement Hurt. Non pas à cause de cette conversation qui s'envenimait, mais uniquement pour le sauver d'une embuscade menée par ce qui avait l'air d'être le propriétaire des lieux. Il ne fallait pas s'y méprendre, Cheetah avait un minimum de respect pour la vie humaine, elle avait déjà épargné des justiciers, et aussi quelques vilains. L'humanoïde, bondit sur l'homme de main à sa droite, le mordant violemment à la gorge, en arrachant une bonne partie qu'elle cracha sur le visage du second pour l'aveugler. Lui aussi ne fit pas long feu, si ce n'est deux griffes s'enfonçant dans chaque orbite pour finir par une estafilade profonde à la gorge. Cheetah poussa alors un grognement enragé en voyant le propriétaire des lieux qui la visait toujours mais sans pour autant lui tirer dessus. Avait-il peur ? Cheetah se remit sur ses deux jambes et un ronronnement commença à résonner dans toute la pièce. Elle s'approcha encore, centimètres par centimètres. Jusqu'à ce que l'homme décide de faire feu. La femme féline esquiva la balle en se remettant à quatre pattes et se jeta sur le fusil de chasse. Peut être qu'elle pouvait paraître comme une humanoïde dont l'intelligence et la réflexion était primaire, cela n'empêchait pas qu'elle savait se servir d'une arme à feu, retournant même cette dernière face à son agresseur pour lui tirer dans la jambes. Elle lacéra ensuite son bras pour lui faire lâcher totalement l'arme.

Ce dernier était tombé à terre tandis que Cheetah ne semblait plus être dans les parages. Elle s'était peut être enfuie. Ce dernier rampait lamentablement à terre. Puis, un miaulement se fit entendre, et dans un rugissement féroce, l'homme se fit emporter, griffant le sol de ses ongles pour essayer de se tenir. Un film d'horreur n'aurait pas pu mieux faire.

Ce fut ensuite un long silence qui se fit présent dans la pièce. Silence qui allait sans doute durer quelques minutes seulement, avec tous les gardes à l'extérieur. Cheetah revient, le sang sur son visage encore légèrement présent. Elle regardait Hurt encore à terre.

« Voilà ce que ça donne d'être enchaîné, nul doute qu'avec ses dernières paroles, cet homme était à votre botte. Et ce que je lui ai fait… Non en fait, ce n'est pas la peine de le dire... »

La scène fut d'une vitesse et d'une violence qui égayèrent le docteur. Il fut projeté au sol, voyant les vitrines et le décor alentour tournoyer alors que des éclats de meubles et des balles ricochaient autour de lui. La réaction de son sous-fifre dépassait la stupidité qu'il lui avait d'abord attribué. S'attaquer à Cheetah était bien l'erreur qu'il s'attendait à le voir tenter désespérément mais pas de façon aussi brouillonne, ça lui apprendra à surestimer ses pantins.

Depuis sa station horizontale sur le sol, Hurt ne put admirer que les mouvements de bras de la chasseresse et les lumières jaillissant des canons de fusils. Des giclées de sang tapissèrent le plafonds et certains murs, au milieu de cris noyés ou étranglés, le genre de spectacle dont il aurait aimé pouvoir savourer chaque instant, mais des rafales l'invitaient à rester encore un peu à l'abri. Il entendit alors la voix si désagréable d'Hestoco qui hurlait comme un diable. Le docteur savoura chaque cri, chaque supplique inutile de cette caricature d'être humain, tellement stupide qu'elle méritait de finir sa vie dans ces hurlements abominables.

Lorsque le calme revint, la voix de Cheetah le moqua de sa hauteur. Hurt se releva, incapable d'accepter la moquerie ainsi. Il s'épousseta les épaules et applaudit des deux gants.

- Belle efficacité.

Il observa les deux cadavres de garde et les traînées de sang qui conduisaient probablement à l'ancien ambitieux subordonné.

- Enchaîné? Moi? Oh, je vous en prie. Pourquoi selon vous ai-je choisi cette villa comme lieu de rendez-vous? Il eut un sourire carnassier. Vous avez largement dépassé mes attentes ma chère. Et entre nous, je serais très curieux de savoir ce que vous avez fait à l'ex-maître des lieux.

Il se dirigea vers un garde et retira un révolver de son holster.

- Permettez qu'à mon tour j'affûte mes griffes, fit-il en vérifiant le chargeur. Je vous ai promis une preuve de l'existence de l'artefact mais après votre tour de force vous êtes en droit d'avoir sa localisation. Cependant, pour l'avoir il faudrait me raccompagner jusqu'à ma chambre en ces lieux. Là je pourrai vous donner l'adresse de votre convoitise.

Il regarda dans le couloir pour repérer la présence de tireurs, tout ce qu'il put percevoir furent les bruits de pas dans l'escalier qui menait à eux. Visiblement les troupes se rassemblaient pour intervenir en haut, les hurlements avaient dû arriver jusqu'à eux.

- Il doit rester quatre ou cinq gardes, expliqua le docteur. Mais depuis ce couloir je crains que nous servions juste de cibles d'entraînement.

Le docteur sortt alors de sa poche un jeu de clefs.

- Passons par l'extérieur.

Il inséra une clef dans la serrure d'un volet métallique qui se déverrouilla et le souleva doucement. Dehors, la nuit avait prit place et une fraîcheur étonnante commença à emplir la pièce. Hurt enjamba la fenêtre et atterrit sur un balcon en mosaïque des plus banals. Depuis sa position, il avait une vue sur un jardin réalisé par un homme qui aimait les sculptures grecques mais qui n'avait pas la moindre idée de ce que bon goût ou sens de la mesure signifiait. Heureusement, le balcon était long et permettait de rejoindre une autre pièce, probablement une bibliothèque qui donnait sur le fameux couloir et permettait de prendre à revers leurs assaillants.

Simon marcha doucement et ouvrit une fenêtre. Depuis la pièce, on entendait les pas des soldats dans le couloir. Ils s'éloignaient, convergeant vers la salle des trophées qu'ils avaient abandonnée plus tôt. Hurt fut ravi de constater en sortant la tête qu'ils étaient bien dos à eux. Parfait. Restait à savoir si lui et Cheetah engageraient le combat ou choisiraient la discrétion en remontant le couloir.

- Une préférence pour l'action ou la discrétion? chuchota-t-il sans réellement savoir si son "invitée" l'avait suivi ou non.

Cheetah n'avait pas attendu plus longtemps, elle se fichait même des petits instants stratégies de Hurt. Un prédateur n'a pas besoin de stratégie, surtout que l'homme était le plus faible de tous les animaux, du moins si son intelligence ne lui permettait pas de se défendre. Pour la féline, la chaîne alimentaire était inversée, c'était l'homme qui se faisait dévorer par le reste. Elle s'élança alors à quatre pattes, et les premiers tendons furent tranchés pour handicaper les gardes. Des lacérations dans le ventre, du sang giclant parfois pour repeindre les murs. Cheetah était une artiste à sa manière, la manière sauvage et la plus expressive qui soit. Sur les gardes restant, elle en laissa quand même deux vivants, sa soif de sang s'était presque éteinte et c'est un unique miaulement qu'elle répondit aux suppliques des survivants. Elle ne faisait clairement pas dans les sentiments, mais avait un certain code guerrier. Il ne fallait pas oublier qu'elle était aussi traître. Elle se tourna alors vers Hurt.

« Faites en ce que vous voulez, et arrêtez de vouloir penser pour moi. Si il y a quelqu'un qui peut vous faire sortir d'ici vivant c'est moi… Ou même vous faire sortir d'ici mort. »

Elle eut un sourire malsain, il ne fallait pas s'y méprendre, quand Cheetah disait qu'elle préférait être solitaire ce n'était pas pour rien. Se faire des alliées avait parfois été une calamité pour elle. Trop lents, trop stupides, désorganisés… Elle préférait effectuer une besogne seule qu'accompagnée, et surtout quand il s'agissait d'un homme qui lui avait tendu un piège pour arriver à ses fins. Elle aurait pu se retourner contre lui pour ne laisser aucun potentiel témoignage dans cette résidence. Mais elle n'était pas sanguinaire à ce point, par ailleurs, elle ne s'en prenait jamais aux autochtones qui résidaient dans la savane.